Faire le point sur sa consommation d’alcool

Si pendant des années une personne a obtenu principalement des effets positifs avec l’alcool, elle va avoir du mal à associer certaines conséquences négatives à cette même consommation. Souvent, elle continue à penser que l’alcool la soulage et elle attribue les aspects négatifs aux éléments extérieurs.
Par exemple, elle peut croire que l’alcool ne joue aucun rôle dans la présence de certains problèmes de santé ou relationnels. En réalité, s’il n’est pas une cause, il peut jouer le rôle d’amplificateur du problème ou d’obstacle à sa solution.

En effet, il est utile de faire le point pour prendre de recul par rapport à votre consommation : 

  • Que vous dites-vous avant de consommer ?
  • Etes-vous dans l’attente de l’apéritif ?
  • Est-ce l’alcool qui motive vos sorties ?
  • Est-ce que vous choisissez des endroits où vous pouvez consommer plus facilement ?
  • Etes-vous accompagné d’amis ou de collègues qui vous poussent à consommer ?
  • Les quantités consommées sont-elles influencées par ceux qui vous accompagnent ?
  • Préfèrez-vous boire seul ?
  • Est-ce que vous poussez les autres à consommer ?

Lors de ces occasions de consommation, décrivez en détail ce que vous ressentez et votre comportement en lien avec la consommation d’alcool en fonction du nombre de verres et votre capacité de maîtrise. Choisissez une situation d’alcoolisation et observez ce qui se passe à l’aide du tableau ci-dessous. Observez la progression des effets de l’alcool sur vos sensations, émotions et votre comportement.

Ce que je ressens,
mes émotions et sensations
Ce que je fais,
mon comportement
Suis-je capable de m’arrêter ?
Faire une pause
dans ma consommation ?
Avant de consommer
Après 1 ou 2 verres
Après 3 ou 4 verres
Après 6 à 8 verres
Après plus de 8 verres
Je ne me sais plus le nombre de verres

Est-ce que ça vous convient ce que vous ressentez et comment vous vous comportez avec l’alcool ?

Pour quels avantages êtes-vous prêt à courir des risques ?

Dans les fiches précédentes, Un mois sans alcool & L’alcool n’est pas un problème pour moi, nous avons réfléchi aux effets de l’alcool et à la quantité consommée. Allons aujourd’hui un peu plus loin. Il n’y a pas de consommation d’alcool sans risques. Les risques que nous prenons dépendent des avantages que nous obtenons. Il est donc important de réfléchir aux avantages que l’alcool vous procure et vérifier s’ils sont bien présents et s’ils sont à la hauteur des vos attentes. Qu’est-ce qu’on recherche à obtenir en buvant de l’alcool ? On appelle « idées anticipatoires », nos croyances concernant les effets positifs de l’alcool. Celles-ci vont se modifier progressivement dans le temps. Au départ, vous aviez peut-être des idées telles que

  • « L’alcool me rend gai »
  • « Il me relaxe »
  • « Boire une boisson alcoolisée me distrait »
  • « Avec l’alcool je parle plus »

Puis les idées concernant les effets de l’alcool peuvent évoluer et devenir différentes.

  • « Il me faut de l’alcool pour être gai »
  • « Sans alcool je n’arrive pas à me relaxer »
  • « L’alcool m’aide à oublier »
  • « Si je suis avec mes amis, je ne peux pas ne pas consommer, je ne serai pas drôle ».

Petit à petit le risque sera de demander à l’alcool des effets que nous ne sommes plus capables d’obtenir par d’autres moyens : être à l’aise en société, devenir plus heureux, oublier les soucis, nous détendre. Ces sont les attentes de soulagement. 

L’alcool vous aide dans les contextes sociaux ?

L’alcool peut faciliter les relations sociales. Il est souvent présent dans des situations sociales. 

Il facilite certains comportements :

« Je parle mieux quand je bois »,
« J’aborde plus facilement les autres »,
« Je n’ai pas peur de danser en boite de nuit ».

L’alcool peut diminuer l’anxiété et donner le sentiment d’être plus compétent en situation sociale, de mieux s’intégrer dans un groupe, d’être plus sûr et à l’aise avec les autres, plus sympathique. 

Est-ce que l’alcool vous aide dans ces situations ? Avez-vous déjà fait l’expérience de ne pas consommer dans ces situations ? Qu’est-ce s’est-il passé ? Recevez-vous des pressions de la part des autres qui vous poussent à consommer ?

L’alcool vous aide à moins souffrir, à moins penser, à moins ressentir ?

Certains boivent pour diminuer une souffrance, être moins anxieux, moins triste, moins tendu. C’est ce qu’on appelle l’effet soulageant de l’alcool. Si la personne utilise l’alcool dans l’attente d’un soulagement, elle risque d’avoir envie de boire chaque fois que le problème se présente. Plutôt que d’apprendre à gérer ses émotions et à trouver une solution efficace au problème. Elle croit peut-être qu’il n’y a pas d’autres solutions pour se soulager de sa souffrance. 

D’un côté, l’alcool soulage des états émotionnels négatifs. De l’autre côté, on peut observer une accumulation de problèmes qu’on cherchait à oublier en buvant. 
En effet, on observe une augmentation d’inquiétudes et soucis. Par conséquent, la personne va avoir encore plus de raisons de continuer à boire. Utiliser l’alcool pour oublier un problème provoque en cascade d’autres problèmes de santé, travail, relationnels et familiaux.

Si vous buvez parce que vous avez un souci, pour « décompresser », est-ce que vous arrivez à résoudre plus facilement les problèmes. Est-ce que l’alcool vous aide à surmonter vos soucis, votre stress, vos anxiétés, les tristesses et frustrations ?  Ou les complique-t-il davantage ?

Les plaisirs de l’alcool ?

Le plaisir ne vient pas seulement du goût de la boisson alcoolisée. Mais de l’association avec les autres effets physiologiques et les modifications comportementales, émotionnelles et cognitives dont nous avons parlé précédemment. Sensation de légèreté, réduction du stress, et euphorie. Quels sont les plaisirs que vous observez quand vous consommez ?

« Je bois par habitude, c’est le moment qui décide« 

L’alcool est toujours consommé dans un contexte : les vacances, la présence d’amis, un contrat signé, une victoire sportive etc. En fonction de la quantité, les effets de l’alcool peuvent être différents. D’un léger effet de facilitation relationnelle (initier plus aisément une discussion, prendre la parole) on peut passer à une inadaptation dans le discours et un comportement exagéré et ridicule si les doses sont importantes. L’association répétée entre contexte et consommation se traduit souvent par des règles qui reflètent une régularité de conditions. Par exemple, manger du fromage avec un verre de vin devient « Il faut un verre de vin pour apprécier le fromage », 

Ces idées sont reçues et construites socialement. Ces croyances partagées jouent un rôle important dans la consommation d’alcool et la perception du plaisir. Quelques croyances font pression vers la consommation 

« Je ne peux pas refuser un verre si on me le propose »
« Une fête sans alcool n’est pas une vraie fête »
« Un plateau de fromages sans vin perd tout son intérêt »
« Comment imaginer le vin d’honneur d’un mariage ou un pot de départ sans alcool ? »
« C’est impoli de refuser un verre »

Quels sont vos habitudes de consommation ? Dans quels contextes buvez-vous systématiquement et sans vous poser de questions ?

Voici un questionnaire pour vous aider à identifier ce qui motive votre consommation.
Le questionnaire mesure 5 groupes d’effets que la personne recherche au moyen de l’alcool. 

Contact social
Goût, habitude
Résoudre des difficultés psychologiques
Recherche d’un effet stimulant
Pharmacodépendance

Nous vous invitons à répondre à ces questions en tenant compte de toutes les situations dans lesquelles vous consommez de boissons alcoolisées. Faites référence aux six derniers mois. Indiquez, à côté de chaque question, le chiffre qui correspond le mieux, suivant cette classification :

0 – Jamais 1 – Parfois 2 – Fréquemment 3 – Très fréquemment

Il m’arrive de prendre un verre :

1) Lorsque je rencontre une personne en particulier 
2) Lorsque j’ai des ennuis, pour les oublier  
3) Par habitude  
4) Pour le goût agréable  
5) Par goût qui est devenu une habitude  
6) Car ce sont des habitudes que l’on avait dans ma famille  
7) Pour me stimuler  
8) En compagnie de mon mari (ou épouse)  
9) Parce que j’aime bien boire un verre  
10) Quand je suis seul(e)  
11) Pour me remonter le moral    
12) Pour éviter des tremblements, le lendemain des jours où j’ai beaucoup bu 
13) Pour faciliter les relations professionnelles  
14) Quand je me sens abandonné(e)  
15) Lorsque j’ai des difficultés que je ne supporte pas    
16) Pour accompagner les repas  
17) Lorsque je me trouve dans un groupe de gens qui boivent  
18) Pour me sentir mieux  
19) Avant de faire quelque chose en particulier  
20) Pour passer le temps  
21) Dans la soirée pour me détendre  
22) Pour me donner un coup de fouet  
23) Lorsqu’on me propose un verre 
24) Quand je me sens seul(e)  
25) Pour être de bonne humeur, quand je suis avec d’autres personnes  
26) Lorsque je m’ennuie  
27) Lorsque je travaille avec quelque chose de particulier  
28) Quand je me sens anxieux(se), tendu(e)  
29) Avant de rencontrer quelqu’un en particulier  
30) Quand je me sens à plat  
31) Quand je suis dans une certaine ambiance   
32) J’ai plaisir à boire  
33) Pour montrer que je peux boire autant ou plus que les autres  
34) Pour être moins anxieux(se), le lendemain de jours où j’ai beaucoup bu 
35) Lorsque je suis entraîné(e) par d’autres à boire  
36) Lorsque je dois faire une chose inhabituelle  
37) Pour me sentir différent de ce que je suis habituellement  
38) Lorsque je dois parler à certaines personnes  
39) Pour éviter des sensations désagréables, le lendemain des jours où j’ai beaucoup bu (mal de tête, nausées)  
40) Pour m’évader, fuir la réalité  
41) Pour me sentir plus sûr de moi dans certaines situations  
42) Pour être plus indifférent à ce qui se passe autour de moi   
43) Quand je me sens fatigué et surmené  
44) Lorsque j’ai pris un premier verre et que je ne peux plus m’arrêter  
45) Pour mieux m’endormir le soir  

Résultats

Pour connaître les résultats, il faut faire la somme pour chaque groupe d’effet. Ensuite, on divise par le nombre des items pour chaque groupe d’effets. Les moyennes aussi obtenues se situent entre 0 et 4. Vous verrez quels effets arrivent en tête. Cela représente ce que vous recherchez avec votre consommation.

Contact social (items 1, 8, 13, 17, 23, 31, 33, 35) à diviser par 8
Goût, habitude (items 3, 4, 5, 6, 9, 16, 20, 32) à diviser par 8
Pour résoudre des difficultés psychologiques (items 2,10, 11, 14, 15, 18, 21, 24, 26, 28, 36, 37, 40, 41, 42, 44, 45) à diviser par 17
Recherche d’un effet stimulant (items 7, 19, 22, 25, 27, 29, 30, 38, 43) à diviser par 9
Pharmacodépendance (items 12, 34, 39) à diviser par 3
Ce questionnaire peut être utilisé comme outil de réflexion sur sa propre consommation. Au-delà d’un score de 24, il y a une consommation à risque.

Maintenant, reprenez vos réponses et réfléchissez aux situations dans lesquelles vous pourriez modifier votre consommation.
Peut-être pourriez-vous réfléchir à d’autres moyens d’améliorer les contacts sociaux que de boire ?
Pouvez-vous casser certaines habitudes, dont celle de boire automatiquement dans certaines situations ?
Quand vous vous trouvez en difficulté psychologique (anxiété, tristesse etc.), quels autres moyens seraient possibles pour diminuer l’inconfort ?
Quand vous vous sentez mal un lendemain de fête, quelles autres solutions pourriez-vous envisager au lieu de reboire un verre ?

Pierluigi Graziani psychologue TCC auteur de Comment arrêter l'alcool aux éditions Odile Jacob

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