Manger pour soulager les émotions négatives

Dans ma pratique, de nombreuses problématiques sont liées à l’alimentation qui peuvent prendre des manifestations très diverses : hyperphagie, boulimie, anorexie. Manger et la nourriture deviennent un moyen de gérer l’émotion.

Des frites pour soulager ma frustration.

C’est quoi une émotion et à quoi elle sert ?

Certaines émotions sont universelles et innées. On nomme ainsi la peur, la colère, la tristesse, la surprise, la joie et le dégoût comme les émotions de base. Mais les émotions c’est quoi ? En effet, elles sont constituées de sensations physiologiques. Par exemple, « Quand je suis triste, ma gorge est nouée », « Quand j’ai peur, je ressens un poids sur la poitrine », « Quand je suis en colère, je ressens une tension dans le cou ».  Elles nous alertent sur ce qui est important dans la vie ou pour notre survie : l’attraction amoureuse facilite le contact, la peur oriente vers la fuite, la colère motive l’attaque.

Régulation des émotions

Lorsque nous ressentons des émotions négatives, cela crée un inconfort. L’être humain est instinctivement « programmé » pour se débarrasser de cet inconfort. Il veut en effet se soulager. Certaines réponses sont automatiques telles que la fuite ou l’attaque, lors que nous avons peur. Mais comment réagissons-nous quand nous sommes tristes ? 

Il y a plein de manières de réguler l’émotion négatives. Certaines sont plus adaptées que d’autres. Par exemple, lors qu’Anna est triste, elle a l’habitude de prendre un bon bain ou de regarder une comédie qui fait rire. Mais Thomas, quand il est triste, il aime bien manger du chocolat car cela le réconforte. 

Tout le monde est triste ou stressé ou anxieux par moment. Notre capacité à gérer et réguler nos émotions négatives dépendrait de notre intelligence émotionnelle. Lorsque la stratégie utilisée soulage l’émotion négative, le cerveau enregistre cela comme positive. Le cerveau crée un lien entre le comportement « manger du chocolat » et la conséquence « soulagement de l’inconfort émotionnel.  Qu’après quelques heures, nous culpabilisons est moins enregistré. L’effet soulagement prime. 

« J’ai mangé trop de sucreries je m’en veux maintenant. »

S’alimenter, un besoin primaire, mais aussi un régulateur

L’alimentation prend une place importante dans nos vies et le comportement de s’alimenter répond à un besoin primaire. L’alimentation est Indispensable tout comme, le besoin de dormir. D’autres besoins primaires sont : se sentir en sécurité, l’appartenance à un groupe, etc. Ces besoins primaires sont inscrits dans notre ADN d’être humain.

Depuis l’évolution de l’être humain, l’alimentation et le comportement de s’alimenter ont changé de forme et de contenu, et sont devenus quelque chose de très complexe.  Dans la nourriture nous trouvons l’énergie pour fonctionner, nous avons besoin d’environ 2000 calories par jour pour alimenter cette machine qui est notre corps. Mais nous y trouvons aussi du plaisir et du réconfort. 

La connotation émotionnelle de l’alimentation

Le concept « alimentation émotionnelle » traduit cet effet que l’alimentation sucrée et grasse peut avoir sur nos émotions inconfortables pour les modifier, les diminuer et les éteindre.

En effet, manger des aliments gras et sucrés devient une stratégie pour un soulagement immédiat : « Je me sens triste, si je prends une glace ou un gâteau, ça va me remonter le moral… »

Comment les aliments deviennent-ils une stratégie de soulagement ?

Il y a une règle très générale : quand un comportement conduit à un plaisir et à un soulagement il a tendance à se renforcer, c’est-à-dire à augmenter sa fréquence d’apparition. Si quand je joue, je gagne alors j’ai tendance à jouer davantage. 

« Tiens, une glace pour soulager ta peine. »

Cela se passe déjà à l’enfance. La société, les parents et l’entourage ont tendance à valoriser certains comportements, par exemple celui de travailler à l’école, ou de supporter la douleur, et d’être altruiste. Pour consoler son fils qui pleure la maman ou le papa lui donne un bonbon. Alors que quand il a bien réussi son évaluation au CP, il reçoit une glace comme récompense. Les aliments peuvent ainsi servir de récompense. Cela renforce ou « valorise » le comportement de ne pas pleurer ou le courage de supporter la douleur et le soulager et celui du travail à l’école. Cela pourrait se traduire par  « Quand je fais quelque chose de bien ou si je souffre, je mérite une sucrerie. »

Ainsi, petit à petit, les aliments ne servent plus seulement à satisfaire une faim, et être une réponse à un  besoin physique mais peuvent devenir conditionnés, c’est-à-dire, « je mange pour modifier mes émotions ». Ils vont devenir un des moyens de réguler les émotions. Lorsque nous sommes tristes, afin de soulager la tristesse, nous avons tendance à manger des biscuits ou du chocolat. Le soulagement peut être immédiat. Mais la stratégie de manger pour réguler les émotions peut avoir des conséquences  désagréables, prise de poids, inconfort gastrique, vomissement et peut être suivi par une grande culpabilité. 

Les troubles de conduites alimentaires

Les troubles de conduite alimentaire dont on entend souvent parler sont l’anorexie, l’hyperphagie et la boulimie. En effet, dans l’anorexie, la restriction alimentaire est telle qu’elle amène un amaigrissement important, pouvant aller jusqu’à la mise en danger de mort de la personne. La personne s’impose une restriction comportementale et cognitive. Elle s’impose de nombreuses règles et au fur et à mesure, ses règles deviennent de plus en plus rigides. Ce fonctionnement procure de bénéfices qui contribuent au maintien du trouble et à son aggravation. L’anorexie est un trouble qui est long et compliqué à traiter. La restriction alimentaire dure souvent depuis un certain temps, et la rigidité cognitive et la peur de la perte du contrôle sont des freins importants pour le travail thérapeutique. 

L’anorexie, un trouble bien complexe.

Quant à la boulimie, les accès hyperphagiques sont des comportements qu’on arrive plus facilement à modifier. La personne « succombe » à la crise pour des raisons particulièrement. En déterminant, les facteurs déclenchants, nous pouvons faire un travail sur ceux-ci, amenant la personne à une meilleure compréhension de son fonctionnement. L’objectif sera de gérer les crises avant que celles-ci deviennent ingérables. 

Problématiques diverses en consultation

Sans être dans ces extrémités, beaucoup de personnes souffrent de ne pas gérer leur comportement alimentaire. Une patiente qui voudrait être aidée à maigrir. Une autre qui mange trop quand elle est stressée et qui culpabilise, ou un monsieur qui lorsque trop anxieux il n’arrive plus à manger du tout.

En effet, l’alimentation peut devenir un problème. Celui-ci peut être ponctuel ou chronique. Les thérapies cognitives et comportementales peuvent permettre d’appréhender l’alimentation différemment. 


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