Je suis perfectionniste, c’est grave ?

Cet article est écrit par notre psychologue Aurélie Roethinger. Aurélie est formée aux TCC, elle accompagne adolescents et adultes. Ses spécialités sont les troubles anxieux, les troubles de l’humeur, les troubles du comportement alimentaires, les difficultés autour de l’estime de soi et de la communication.

« J’ai fait une erreur, c’est une catastrophe »

« Je pourrais faire mieux »

« Si ce n’est pas parfait, à quoi bon le faire »

« J’ai préféré ne pas me présenter l’examen, pour ne pas risquer d’avoir un résultat moyen »

Voici des paroles de personnes présentant des exigences élevées envers elles-mêmes. Ce perfectionnisme qui peut s’avérer problématique…

Définition de perfectionniste 

Selon la définition du Larousse, c’est la « tendance à vouloir tout faire avec un souci exagéré de la perfection ». Parfois, nous mettons en avant ce trait comme une qualité. On décrit une personne comme, « il cherche à faire les choses de la meilleure manière possible ». Or, la quête de la perfection, s’il est trop rigide, peut générer de la souffrance.

Décryptons ce trait de personnalité et son impact sur les pensées, les émotions et les comportements.

Perfectionnisme positif ou perfectionnisme problématique ?

Être perfectionniste n’est pas mauvais en soi. Cela peut avoir un rôle positif en nous apportant la motivation, la combativité nécessaire pour mener à bien un projet. Il nous permet la poursuite d’objectifs nécessitant application et minutie. Il nous permet de réussir brillamment une tâche et nous en sommes fiers du résultat. Dans ces cas-là, il est vécu positivement.

Vous vous reconnaissez dans ce type de perfectionnisme ? C’est que vous avez vis-à-vis de vous-même des attentes élevées, mais que vous êtes capable de les moduler selon les situations et le niveau d’importance des tâches à mener. Vous parvenez également à ressentir de la satisfaction en conséquence du travail accompli car les critères d’évaluation de vos accomplissements sont adaptés et réalistes. 

Vous choisissez d’adopter cette attitude perfectionniste pour le sentiment de satisfaction personnelle qu’elle entraîne et l’impact positif sur l’estime de soi. En conséquence, vous êtes également capable de relativiser vos erreurs et de ne pas ruminer excessivement dessus. 

Cependant, pour certains le perfectionnisme peut être un frein à l’action. Être perfectionniste peut empêcher l’accomplissement de soi. Voici quelques repères d’un perfectionnisme problématique :

  • Lorsqu’il est appliqué de manière globale à tous les domaines de la vie quotidienne quelle que soit l’importance de la tâche. 
  • Lorsque les standards élevés sont sans lien avec les compétences et possibilités réelles de la personne : les critères de réussites sont inaccessibles. On dirait que ces personnes ont oublié que « la perfection n’existe pas  ». Les efforts ne semblent alors jamais suffisants.
  • Lorsque le perfectionnisme n’est pas choisi pour savourer une satisfaction personnelle mais pour éviter un jugement dévalorisant vis-à-vis de soi-même ou pour tenter de combler un besoin de plaire aux autres.
  • Lorsque les erreurs et échecs sont inacceptables et aboutissent à une focalisation sur ces événements, entraînant en parallèle la minimisation des réussites. 

Quel impact du perfectionnisme sur nos émotions, pensées et comportements ?

Face aux situations auxquelles nous sommes confrontées au quotidien, nous pouvons identifier des pensées, des émotions et des comportements. Selon notre personnalité, nos croyances, notre attitude face à la vie et notre humeur du moment, nous allons « mettre le projecteur » sur certaines de nos pensées et leur donner davantage d’importance qu’à d’autres. Nos pensées auront alors un impact sur nos émotions et nos comportements et inversement. 

Les pensées qui retiendront notre attention dans le cadre d’un perfectionnisme problématique vont nous permettre de distinguer trois types de règles de vie : 

  • Le perfectionnisme orienté vers soi : « je dois être parfait sinon je ne vaux rien »
  • Le perfectionnisme socialement prescrit : « je dois être parfait pour que les autres m’apprécient »
  • Le perfectionnisme de contrôle : « je dois être parfait pour tout prévoir et anticiper les problèmes »

Distorsions cognitives du perfectionnisme

De ces règles de vie rigides vont découler des pensées dysfonctionnelles que l’on appelle les distorsions cognitives. On peut citer notamment le fait de penser en « noir ou blanc » (« si ce n’est pas parfait alors c’est totalement raté »), l’abstraction sélective (se focaliser sur le détail qui renforce l’idée qu’on a échoué), le fait de maximiser le négatif (entraine une hypervigilance sur les éventuelles erreurs) ou encore le fait de se mettre une étiquette (« je suis un échec car j’ai fait une erreur »).

Je suis perfectionniste et j’en souffre

Les émotions qui peuvent être observées vont être principalement la déception, de la fatigue, un sentiment d’insatisfaction et du stress à rechercher toujours une performance parfaite pour se sentir valable et avoir une bonne estime de soi. L’estime de soi va souvent être fragilisée par un perfectionnisme excessif. Ceci est dû à l’évaluation systématique négative de ses réalisations.

Dans le cadre du perfectionnisme poussant à se sentir toujours apprécié et approuvé par les autres les émotions ressenties vont être l’anxiété, la honte, l’embarras, le stress ou encore la tristesse notamment face aux situations où je vais percevoir un élément laissant penser que je suis rejeté.

Le perfectionnisme de contrôle va également générer de l’anxiété et du stress et le fait de se sentir surmené par un manque de possibilité de se faire aider (« pour que tout se passe bien, je dois tout faire par moi-même »).

Être perfectionniste et comportements dysfonctionnels 

En conséquence, ces phénomènes vont parfois générer une productivité réduite liée à une paralysie de l’action, de la procrastination voire l’évitement total des situations. Ces comportements vont renforcer les pensées et émotions négatives « je n’ai pas réussi à m’y mettre donc j’ai échoué/je ne suis pas capable ».

A l’excès, le perfectionnisme peut faire partie de problématiques plus globales comme l’anxiété sociale, le trouble obsessionnel compulsif, les troubles des comportements alimentaires ou encore la dépression.

Comment gérer son perfectionnisme ?

L’approche des thérapies cognitives et comportementales a démontré son efficacité pour apprendre à gérer un perfectionnisme excessif.

Il s’agira dans un premier temps d’évaluer deux aspects : 

  • Quels sont les domaines dans lesquels le perfectionnisme s’exprime ? De quelle manière ?
  • Quelles sont les avantages et inconvénients que l’on retire à être perfectionniste ?

Une fois ces constats établis, il s’agira d’agir aux différents niveaux évoqués ci-dessus : 

  • Les émotions, en utilisant des techniques d’acceptation et de gestion des émotions (respiration abdominale, relaxation ou méditation par exemple)
  •  Les pensées, en identifiant les distorsions cognitives et les règles de vie rigides qui en découlent et en essayant ensuite de les relativiser. Il s’agira de se poser des questions du type : 
    • Quelles seraient les conséquences d’un échec dans cette situation ? 
    • Sur toutes les situations de ce type, combien de fois ai-je vraiment échoué, combien de fois ai-je objectivement réussi ? 
    • Quels sont les arguments qui vont dans le sens d’une issue comme un échec/d’une issue plus favorable ?

Aussi, la « technique des modèles imparfaits » consistant à identifier des personnes estimées autour de soi et à identifier sur quels aspects ces personnes sont parfaites et imparfaites peut être intéressante.

Finalement, l’apprentissage de la nuance est essentiel : éviter les mots généralisant « toujours, jamais » et apprendre à s’évaluer sur un continuum et non plus en « noir ou blanc ». 

  • Les comportements : au-delà du travail sur les pensées et les émotions, l’expérimentation dans la réalité de la survenue ou non des conséquences catastrophiques appréhendées est une étape importante. Cela va consister à se mettre dans une situation d’imperfection, à s’y exposer. Il faudra veiller, pour commencer, à choisir une situation où on ne se sent pas trop en danger et à expérimenter ce qui va se passer : le scénario catastrophe redouté se confirme-t-il ? 

Cet exercice pourra permettre de déconstruire progressivement la pensée que toute erreur est impardonnable et entraine le rejet. 

Conclusion

Si votre perfectionnisme vous fait souffrir au quotidien, si vous ressentez un impact sur l’estime que vous vous portez et sur votre humeur, un travail sur ce sujet pourrait vous être bénéfique. N’hésitez pas à solliciter l’aide d’un psychologue qui pourra vous accompagner dans cette démarche.

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